À
ce stade, il importe de préciser le cadre de nos réflexions. Nous
l’avons dit, l’individu capitaliste est une utopie, l’éthique
capitaliste est aussi une utopie et la société capitaliste est également
utopie. Cela ne veut pas dire que nous parlons de choses qui n’existent
pas en tant que telles. Le propre de ces utopies est de s’incarner dans
une certaine mesure et de conformer les forces de désirs, les
aspirations des corps sociaux, individuels ou collectifs. Si certaines
figures, si certains corps semblent vouloir se conformer aux utopies,
ils n’y parviennent que dans une certaine mesure. Il y a un reste. Ce
n’est pas que l’homme sans qualité, programmé comme un robot, intéressé
par le seul lucre n’existe pas ; c’est que derrière tout individu ou
toute société s’approchant de près ou de loin de ce concept, il y a
toujours autre chose, un quelque chose qui ne correspond pas. Le plus
odieux des hommes d’affaire est un enfant blessé qui veut prouver
quelque chose à son père, par exemple, l’évangéliste capitaliste
officiant sur les ondes est un jardinier amateur, le DRH le plus
inhumain est un amateur de bon vin, etc. Tout fonctionne comme si le
système économique était fondé sur une anthropologie implicite boiteuse
et que les humains incapables de s’y conformer organisaient une
représentation d’une image d’eux-mêmes plausible du point de vue de
ladite anthropologie.
Nous devons organiser une représentation de ce que nous ne sommes pas, nous devons cacher ce que nous sommes pour correspondre à des implicites anthropologiques captieux. Pour autant, à force d’intérioriser de faux modèles, de se conformer à des impératifs normatifs, bien que nous ne devenions jamais, que nous ne puissions jamais devenir ces masques, le spectacle de la norme sculpte la société, la forme et en détermine aussi bien les ressorts en termes de désirs individuels et collectifs que l’image qu’elle a d’elle même.
Finalement, la force de l’anthropologie implicite utopique, c’est de faire ressentir l’exil à toutes et à tous, c’est que chacun se sente importun, accidentel ou dérangeant, c’est que chacun refoule ses envies, ses tensions, ses blessures pour que tout continue.
En ce sens, l’utopie est de nature religieuse et fanatique. Elle a vocation à régir l’ensemble de l’existence humaine. Les caractères dont nous parlons dans cet ouvrage n’existent pas en tant que tels. Ils existent en tant qu’utopies qui nous exilent, nous qui, du fait de notre humanité, ne pouvons fonctionner dans selon ladite anthropologie. Nous parlons d’identités qui n’existent pas en tant que telles mais conforment en tant qu’images idéales. Il s’agit de métaphysique inexistante et agissante.
Nous devons organiser une représentation de ce que nous ne sommes pas, nous devons cacher ce que nous sommes pour correspondre à des implicites anthropologiques captieux. Pour autant, à force d’intérioriser de faux modèles, de se conformer à des impératifs normatifs, bien que nous ne devenions jamais, que nous ne puissions jamais devenir ces masques, le spectacle de la norme sculpte la société, la forme et en détermine aussi bien les ressorts en termes de désirs individuels et collectifs que l’image qu’elle a d’elle même.
Finalement, la force de l’anthropologie implicite utopique, c’est de faire ressentir l’exil à toutes et à tous, c’est que chacun se sente importun, accidentel ou dérangeant, c’est que chacun refoule ses envies, ses tensions, ses blessures pour que tout continue.
En ce sens, l’utopie est de nature religieuse et fanatique. Elle a vocation à régir l’ensemble de l’existence humaine. Les caractères dont nous parlons dans cet ouvrage n’existent pas en tant que tels. Ils existent en tant qu’utopies qui nous exilent, nous qui, du fait de notre humanité, ne pouvons fonctionner dans selon ladite anthropologie. Nous parlons d’identités qui n’existent pas en tant que telles mais conforment en tant qu’images idéales. Il s’agit de métaphysique inexistante et agissante.