Nous l'avons dit, Harribey5
avait déjà vu que les impôts fonctionnaient comme un ajout de
valeur économique et non comme une ponction. La mise en concurrence
des marchandises à prix soumises à des impôts oblige les
compétiteurs à intégrer l'impôt dans leur calcul de prix. Tous
l'intègrent et l'impôt se retrouve donc dans tous les prix. Les
prix ont donc été au final augmentés de la valeur des impôts. De
même, les cotisations sociales fonctionnent de cette façon :
elles sont intégrées dans tous les prix6.
Nous avons vu que, de manière encore plus générale, les salaires
constituaient l'essentiel des prix, qu'ils créaient la valeur
économique et que le processus salarial de création de valeur
économique était parasité par la rente.
Le parasitisme de la rente n’est pas seulement un problème de
pouvoir d’achat. Ce parasitisme détermine surtout la nature et
l'organisation de la production concrète. Or, c'est cette nature et
cette organisation de la production concrète qui sont en jeu quand
il s'agit d'évaluer le rapport entre l'économie abstraite et les
ressources. Une création de valeur économique salariale n'implique
pas nécessairement le pillage des ressources puisque ce n'est pas le
fonctionnement abstrait qui est en cause ici mais bien le
fonctionnement concret de l'économie.
Pour prendre un cas d'école aussi simple qu'impossible, on peut
imaginer un PIB qui triple avec des salaires qui triplent sans que la
production concrète soit en rien affectée. Les gens gagnent et
dépensent davantage de salaire pour acheter des marchandises dont le
prix augmente puisque les salaires qu'il reconnaît augmente. Ce
faisant, les prix augmentant et les salaires augmentant en
proportion, on se retrouve avec les mêmes pratiques économiques
concrètes. Pour prendre un autre exemple, un tout petit peu moins
irréel, on a pu constater que, entre les années 60 où un revenu
suffisait à faire vivre un ménage de la classe moyenne et les
années 2010 où il en fallait deux pour un résultat comparable en
terme de train de vie, de standing ou de confort, on peut dire que
l'équivalent social des salaires a été divisé par deux : il
faut deux fois plus de salaires pour un même niveau de vie relatif.
Pour autant, ces cinquante dernières années, alors que l'importance
du salaire décroissait, l'économie réelle mettait davantage à
contribution les ressources naturelles, les ressources humaines ;
on forait des puits de pétrole en haute mer, on mettait au point le
lean, le management par la haine et d'autres techniques managériale
nuisibles à l'humain. Le salaire lui-même n'est donc pas
nécessairement lié à la dégradation, au pillage des ressources
alors que le
PIB, la valeur économique produite vient finalement toujours des
salaires. C'est dire que la valeur abstraite, la valeur salariale ne
dégrade pas nécessairement les
ressources, elle peut les dégrader mais on peut imaginer une
création de valeur économique qui ne mette pas en danger les
ressources humaines et naturelles de l'économie concrète.