Si l'on considère l'économie concrète, les pratiques du travail
concret, on arrive aux mêmes conclusions. Il est possible d'avoir
des pratiques de travail concret qui détruisent la nature et
l'humain – nous en avons l'exemple multiplié à l'envi tous les
jours, dans le chapelet des catastrophes industrielles – mais on
peut également souligner des pratiques de production concrète qui
n'abîment ni l'humain ni la nature. Que l'on songe aux pratiques
agricoles de permaculture qui enrichissent l'humus,
que l'on songe aux coopératives, aux SEL7,
aux monnaies locales … il ne s'agit pas d'idéaliser telle ou telle
pratique de l'économie concrète mais il s'agit de voir que le
travail concret et, avec lui, la production économique concrète
(nous ne parlons pas de l'abstrait, de la violence sociale mais du
nous parlons bien du concret, de la relation d'humanisation de la
nature). On peut avoir une production agricole sans dol pour la
nature. Pour l'humain, c'est plus rare du fait des
conditions
concurrentielles particulières du secteur. On peut avoir une
production d'atelier, d'usine en coopératives, comme dans certaines
entreprises
réappropriées en Argentine, qui respecte les rythmes et le besoin
de codécision des travailleurs. Indépendamment de ces heureuses
expériences intéressantes, il y a aussi des travailleurs dans
l'emploi qui aiment leur travail, s'y épanouissent, trouvent un réel
plaisir technique et humain à l'accomplir – ces choses existent.
Pour être complet, il faut aussi mentionner le travail concret hors
emploi presté par les pensionnés, par les fonctionnaires
statutaires ou par les chômeurs (garde d'enfant, entretien du bâti,
travail de socialisation, formation, etc.). Il y a là une production
concrète considérable. Cette production respecte nécessairement
l'humain qui en est l'auteur puisqu'elle se fait sur base volontaire
– en mettant de côté les éventuels cas de manipulations
psychiques hors propos dans notre réflexion. Elle est nécessairement
plus respectueuse des ressources naturelles
puisqu'elle
s'opère indépendamment de la pression de la concurrence, de
l'impératif de productivité. Cette production concrète ne doit
donc pas recourir à l'externalisation des nuisances et peut assumer
tous ses coûts environnementaux et sociaux.