Définition et enjeux

Construction et herméneutique d'une économie de la puissance humaine

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Surproduction et austérité

L'importance du taux de concentration du capital (moyen ou extrême) obère l'outil industriel. Les salariés dans l'emploi et hors emploi ne peuvent plus soutenir l'appareil productif par leur demande salariale et, à partir du moment où l'appareil productif s'effondre, la rare production qui demeure devient impayable pour les rares salariés épargnés. Étrangement, cette inflation salariale au sens où nous l'avons défini correspond à une diminution des prix et à un effondrement des salaires. Pour prendre un exemple qui parle aux Espagnols ou aux Grecs, si les prix baissent de 20 % et les salaires baissent de 60 %, il y a bien une inflation salariale en dépit de la baisse des prix, en dépit de la déflation technique. Les gens s'appauvrissent en Espagne et en Grèce au moment où nous écrivons ces lignes, la demande s'effondre dans ces pays, la machine économique se grippe et le chômage, la misère se généralisent.

Proposition 18
Une politique dite d'austérité crée de l'inflation salariale et de la déflation des prix. Elle rend les dettes impayables.


Cette inflation salariale est induite par la guerre aux salaires, par les mesures dites de rigueur dans les années 1980 puis d'austérité depuis les années 2000 qui contractent globalement les salaires, rendant les biens et les services inaccessibles aux salariés.

Note 10. La surproduction et la crise (rappel)

La surproduction, c'est une crise liée à la hausse de productivité. Comme toutes les entreprises sont en concurrence, elles tentent d'augmenter leur productivité, leur production horaire de valeur ajoutée. Pour ce faire, elles compriment les salaires et, comme toutes les entreprises agissent de la même façon, au bout du compte, elles deviennent toutes plus productives alors que les salaires sont globalement diminués.



En terme de valeur économique, les gains de productivité sont annulés par la déflation, les calculs individuels, égoïstes des entrepreneurs vont contre leurs intérêts économiques macro-économiques: en comprimant individuellement les salaires pour réduire les coûts de leur entreprise et l'emporter face à la concurrence, les patrons sapent la solvabilité de leur clientèle à tous, c'est-à-dire leur potentiel à tous à produire de la valeur ajoutée de vendre, d'écouler leur production.



La demande repose d'abord sur les salaires, notamment les petits salaires puisqu'ils sont intégralement dépensés et beaucoup moins sur les gros salaires ou sur les dividendes sujets à épargne.



L'offre, par contre, dépend de la valeur ajoutée dans son ensemble. La surproduction, c'est quand la demande ne parvient pas à suivre l'offre.



Comme les salaires sont moindres, les marchandises produites ne trouvent plus acheteurs, ce qui contraint les entreprises à licencier, ce qui diminue les salaires, via la pression du chômage, chose qui diminue le chiffre d'affaire, la valeur ajoutée des entreprise. De ce fait, comme les salaires sont comprimés, la demande est anémiée: les marchandises ne peuvent trouver preneurs, etc.



L'austérité est justifiée par la dette et par l'équilibre des comptes publics. La dette est détenue par des gens qui ont pu épargner sur leurs revenus. Nous l'avons vu, les gens qui peuvent épargner sont essentiellement des gros revenus - soit des salaires mirobolants, soit des revenus issus des dividendes, éventuellement par le truchement de produits financiers plus ou moins exotiques. Si c'est une épargne issue de salaires mirobolants, elle grève la productivité puisqu'il s'agit d'une partie non dépensée du capital produit ; si c'est de l'épargne issue de dividendes, il s'agit d'un vol de valeur ajoutée au producteur.

Nous avons donc une dette publique qui justifie une série de mesures d'austérité. Voyons en quoi consistent les politiques d'austérité.

Elles réduisent les dépenses publiques, c'est-à-dire la partie de la valeur ajoutée qui correspond à la reconnaissance de la valeur créée hors du marché de l'emploi par les fonctionnaires. Cette mesure pousse une partie des fonctionnaires au chômage, ce qui les oblige à se mettre sur le marché de l'emploi.

L'austérité ampute également les budgets sociaux, les prestations de la sécurité sociale dues aux chômeurs ou aux retraités. Ces coupes ont comme effet de diminuer le PIB, la valeur ajoutée nationale et elles privent de reconnaissance économique une série d'agents économiques hors de l'emploi. De nouveau, les sexagénaires et les chômeurs sont poussés à accepter n'importe quel emploi à n'importe quel prix sur le marché de l'emploi.

Comme les chômeurs, les anciens-futurs retraités et les anciens fonctionnaires cherchent de l'emploi à tout prix, les salaires des employés diminuent du fait de l'austérité. Ceci grève la productivité nationale, fait baisser le PIB et prolonge la crise économique.


Au final, les politiques d'austérité favorisent l'emploi et tuent le salaire. Elles

- font baisser les salaires, notamment les salaires socialisés, indépendants du marché de l'emploi

- interviennent dans la lutte entre les producteurs et les propriétaires à l'avantage des seconds

- poussent les actifs à se vendre sur le marché de l'emploi

- diminuent les revenus publics (alors qu'elles sont censées éponger des dettes)

- diminuent les revenus nationaux (ce qui rend le pays moins solvable et les dettes plus compliquées à honorer).

Souvent, les politiques d'austérité s'accompagnent de dégradations des conditions de travail, de recul du droit du travail et d'appauvrissement des travailleurs. Elles n'ont pas d'effet positif sur les comptes publics mais pourrissent le rapport du force dans le monde de l'emploi, elles permettent de sauver, d'augmenter les dividendes alors que l'économie sombre et que les employés sont de plus en plus exploités - mais c'est peut-être là leur véritable objectif. En favorisant l’accumulation au détriment de la réalisation du capital par les salariés, les politiques d’austérité sapent tous les fondements de l’économie productive et rendent les dettes impaybles du fait de la déflation des prix qu’elles induisent.