Définition et enjeux

Construction et herméneutique d'une économie de la puissance humaine

Fichier PDF ici

À nos amis,
à ceux qui ont trouvé
à ceux qui cherchent encore

L'écologie

L'effet rebond rend l'écologie paradoxale – c'est-à-dire, dans la mesure où l'écologie est la négation du capitalisme, il le rend subparadoxal. L'effet rebond, c'est le piège de la production vertueuse : par exemple, en produisant des voitures qui consomment cinq litres d'essence aux cent kilomètres plutôt que dix, on en rend l'utilisation beaucoup plus économique. Comme il est moins coûteux (et moins polluant) d'utiliser la voiture, les gens l'utilisent davantage. Au final, si l'on divise la consommation au kilomètre par deux, on multiplie le nombre de kilomètres parcourus par … trois. L'un dans l'autre, la consommation d'essence aura augmenté de moitié avec l'invention de moteurs plus économiques en carburant et plus écologiques.

De manière plus sournoise, un train de vie simple, austère, permet à toutes autres choses égales par ailleurs d'épargner. Ce train de vie ménage l'environnement et les ressources naturelles. La consommation se réduit au minimum, l'empreinte écologique diminue. Mais l'épargne réalisée par ce train de vie – éventuellement joyeux, peu importe – payera un splendide séjour militant aux États-Unis ou un voyage alternatif au Maroc … dans un avion flambant neuf. L'épargne du militant écologique austère se retourne contre l'écologie et pour l'économie capitaliste dans un clin-d’œil narquois : il est difficile, sur le long terme, de ne pas dépenser l'argent gagné. Le militant écologiste peut aussi garder son épargne sans la réaliser. Ses ayants-droits se payeront le voyage aux Seychelles à sa santé et, en attendant, son banquier pourra investir en utilisant les effets leviers dix fois la somme épargnée dans des projets cataclysmiques du point de vue écologique, des projets d'extension liés à … l'accumulation, à la non réalisation de l'intégralité de la valeur ajoutée.

On peut aussi pousser le militantisme jusqu'à gagner moins d'argent, jusqu'à se priver de revenu, d'emploi, de poste. C'est très honorable et, économiquement et politiquement, cela pourrait s'assimiler à une grève de chômeur aussi redoutable qu'efficace contre les capitalistes. Mais le chômage de masse combiné au fait que cette « grève » s'inscrit dans une démarche individuelle isolée permet juste à un autre travailleur de prendre le fameux poste, le salaire et le train de vie qui y sont attachés. Par contre, si la pratique de cette grève se généralisait, elle deviendrait une arme politique de première importance aussi bien dans le rapport de force entre le travail et le capital qu'en termes de surgissement de réalités, de puissances matérielles d'un autre type.

De la même façon que nos réflexions appelaient à ne pas jeter les bébés État ou marché avec l'eau du bain capitaliste, l'écologie et l'écologie politique offrent des outils générateurs de considérations essentielles à prendre au sérieux (et il est à espérer qu'on n'en fera pas l'économie) dans la mesure où elles s'affranchissent du capital, dans la mesure où les bénéficiaires des ressources communes, les producteurs humains, en décident l'affectation au mieux de leurs intérêts à long terme.

De manière plus cynique, plus visible, le greenwashing, le capitalisme vert transforme le spectacle, la mise en scène de l'écologie en chiffre d'affaire, en argument publicitaire, en logique capitaliste. Dans cette optique, il ne reste rien de l'écologie puisqu'elle est utilisée de manière paradoxale, ce qui affirme son opposé capitaliste et nie l'écologie politique.

Proposition 188
L'écologie et l'écologie politique a priori opposées au capital en deviennent des négations paradoxales, elles deviennent des forces de maintien et d'affirmation du capital par l'effet rebond et le greenwashing.
Proposition 189
L'emploi comme institution collective s'oppose à la barbarie brute de l'exploitation capitaliste mais légitime son mode de distribution de la valeur économique et son asservissement.