Flebas sur son blogue explique en quoi l’étymologie traditionnelle du mot travail qui le rattache à une torture a été mise en cause. <https://blogs.mediapart.fr/flebas/blog/240316/l-arnaque-de-l-etymologie-du-mot-travail#_edn6>, extraits:
« Il est préférable de rechercher une source qui serait commune à l’anglais travel et au français travailler, en imaginant une bifurcation vers l’idée du voyage – accompagnée de l’idée d’effort ou d’obstacle à franchir – et une autre vers l’idée plus générale de « tension vers un but rencontrant une résistance ».
C’est possible dès lors qu’on rassemble les pièces du puzzle :
(1) Le verbe hispanique médiéval trabajar, dont l’histoire a partie liée à celle de travailler, exprime une « tension vers un but rencontrant une résistance »,
(2) Le préfixe latin trans- se réduit parfois à la forme tra-,
(3) travel et travail ont une étymologie commune.
On peut en déduire que travailler s’est formé sur une base lexicale exprimant un mouvement, qui s’articule au préfixe tra- exprimant la notion de passage assortie d’une résistance[*]. Cette base utilise manifestement la séquence consonantique [vl]. Cette nouvelle hypothèse est cohérente avec l’existence d’un morphème -val- présent dans dévaler, val, vallée, etc., mais aussi de la variante [bl] et notamment du morphème -bal- présent dans balayer, bal, balade, etc. En somme, tout se passe comme si le parcours menant à travailler était proche de celui menant à trimbaler ou trabouler[**] (qui a donné traboule = passage qui traverse un pâté de maisons). D’ailleurs, l’origine supposée de trabouler est un verbe hypothétique du bas latin *trabulare, réduction du latin classique transambulare. Le verbe *trabulare, s’il a bien existé, pourrait donc être le chaînon manquant, de façon bien plus convaincante qu’un *tripaliare issu de l’instrument de torture.
*Michael Grégoire, sur la base d’une étude de l’espagnol, propose un continuum partant de la forme tri- vers la forme tra-, en passant par tre-, tru-, et tro-, comme exprimant différents degrés de « dépassement de l’entrave ». A l’extrémité de cette échelle, la forme tra- exprimerait la présence d’une entrave mais aussi son dépassement complet (Michaël Grégoire, 2012, Le lexique par le signifiant. Méthode en application à l’espagnol, Presses Académiques Francophones, Sarrebruck).
**À noter que le rapprochement travailler/trabouler est cohérent avec la création du nom boulot, synonyme de travail. »